Etre indemnisé d’un accident de la route

Si vous êtes victime d’un accident de la route, vous devez être indemnisé des blessures subies, de votre dommage corporel.
Avant de préciser la procédure d’indemnisation (II), il convient dans un premier temps de préciser la notion légale d’accident de la route et celle de victime (I).
I/ La victime dans le cadre d’un accident de la route
Cette matière est régie par la loi Badinter du 5 juillet 1985, l’objectif étant d’améliorer le sort des victimes, d’accélérer l’indemnisation, en privilégiant le processus amiable.
Ce texte se fonde sur la notion d’implication d’un véhicule dans le cadre d’un accident.
A/ Notion d’accident
Il doit s’agir un accident, interprété de façon large par la Cour de cassation, mais qui ne doit pas être volontaire, notamment en matière d’infractions pénale.
Il faut un fait involontaire.
S’il s’agit d’un fait volontaire, la loi de 1985 ne pourra trouver à s’appliquer, dans cette hypothèse, le juge pénal sera compétent si le fait volontaire constitue une infraction.
B/ Notion de circulation
La Cour de cassation admet les véhicules en mouvement mais aussi à l’arrêt.
Elle a ainsi reconnu l’application de la loi de 1985 pour un véhicule en stationnement qui prend feu et se propage aux autres véhicules.
Concernant la voie de circulation, la Cour de cassation a une conception large et admet la circulation sur un parking privé ou public, une plage ou encore une piste de ski.
Le lieu doit être destiné à la circulation, ce qui n’est pas le cas d’un hall d’immeuble.
Dans le cadre d’une compétition sportive, la loi s’applique pour les victimes mais pas pour les concurrents.
C/ Notion de véhicule terrestre à moteur (VTM) impliqué
La Cour de cassation retient la notion de transport.
Ainsi, une tondeuse n’est pas un véhicule terrestre à moteur.
Il faut que le véhicule soit équipé d’un moteur.
Pour les trottinettes électriques, elles doivent être assurées et devraient donc être considérées comme des véhicules terrestres à moteur.
Les vélos à assistance électrique ne sont pas considérés comme des VTM, car l’action humaine est nécessaire pour avancer.
La notion d’implication, signifie « jouer un rôle », à quel que titre que ce soit, peu importe, qu’il soit en mouvement ou à l’arrêt.
L’implication du véhicule est présumée quand il y a un contact.
Sinon, la victime devra apporter la preuve de l’implication en l’absence de contact.
En matière d’accidents complexes (carambolage par exemple), la Cour de cassation admet que la victime peut demander réparation à n’importe lequel des véhicules impliqués.
D/ Droit à indemnisation
Dès que le véhicule est impliqué, il y a un droit à indemnisation.
La force majeure n’est pas exonératoire, y compris lorsque la victime est conductrice, mais on peut lui opposer sa propre faute, pour limiter ou exclure son indemnisation.
Pour les autres victimes, seule la faute inexcusable peut écarter leur indemnisation.
E/ Notion de dommage et d’imputabilité du dommage de l’accident
L’accident doit avoir causer le dommage.
En jurisprudence, il existe une présomption d’imputabilité au dommage, la Cour de cassation retenant le dommage dans un temps voisin comme une crise cardiaque après l’accident.
F/ Notion de conducteur et gardien
L’obligation d’indemnisation pèse sur l’assureur du conducteur ou gardien du véhicule.
Si le conducteur ou gardien du véhicule n’est pas assuré, la victime sera indemnisé par le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires (FGAO).
Le conducteur est en jurisprudence celui qui maîtrise le véhicule.
G/ Notion de victimes
Il y a lieu de différencier le passager transporté, le piéton et cycliste du conducteur.
Le responsable ou son assureur ne pourra jamais opposer au passager, piéton et cycliste la force majeure ou le fait d’un tiers.
Quand la victime n’est pas conductrice, elle est pratiquement automatiquement indemnisée.
Il faut en effet démontrer une faute inexcusable, cause exclusive du dommage pour échapper à l’indemnisation.
La loi de 1985 protège par ailleurs les victimes les plus vulnérables.
La faute inexcusable est stricte, il s’agit d’une faute volontaire, d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger, dont il aurait dû avoir conscience.
L’état d’ivresse de la victime ne permet pas toujours de retenir la faute inexcusable.
En jurisprudence, a été retenue la faute inexcusable quand la victime, ivre s’allonge sur la route de nuit.
Pour le passager transporté, la faute inexcusable est très rare, ainsi a été décidé que ne constituait pas une faute inexcusable du passager, le fait de laisser conduire une personne en la sachant en état d’ébriété.
L’état de confusion mentale semble permettre d’écarter la faute inexcusable.
Il faut en outre que cette faute soit la cause exclusive de l’accident, le conducteur ne doit avoir commis aucune faute.
Pour les victimes les plus vulnérables, il faut un fait volontaire, souvent une volonté de se suicider.
Quand la victime est le conducteur, il peut lui être opposé sa propre faute.
La victime est cependant présumée non conductrice.
La faute doit être la cause du dommage.
L’absence de faute de l’autre conducteur ne signifie pas forcément que la faute est nécessairement la cause du dommage.
Si aucune faute n’est retenue, le conducteur est indemnisé de plein droit.
Quand les circonstances de l’accident sont indéterminées, les deux conducteurs seront indemnisés.
H/ L’offre d’indemnisation de l’assureur
La loi avait pour objectif de limiter le contentieux en imposant à l’assureur certaines obligations.
L’assurance qui garantit la responsabilité civile du véhicule doit présenter une offre d’indemnisation
En l’absence d’assureur, c’est le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires (FGAO) qui présente l’offre.
Si la victime est décédée, ce sont conjoint et héritiers qui reçoivent l’offre.
L’assureur doit informer la victime de ses droits.
La victime doit fournir des renseignements afin de permettre à l’assureur de faire son offre.
L’assureur doit faire une offre dans un délai de 8 mois à compter de l’accident à la victime ou à ses proches en cas de décès.
L’offre peut être provisionnelle, si l’assureur n’a pas eu connaissance de la consolidation dans les trois mois de l’accident, les 5 mois restants continueront à courir une fois la consolidation acquise.
L’offre doit comprendre tous les éléments indemnisables, y compris aux biens s’ils n’ont pas déjà été réglés.
Chaque poste est détaillé.
Quand l’offre est insuffisante ou en l’absence d’offre, l’indemnité produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal jusqu’au jour de l’offre ou du jugement définitif.
Il est impératif de soumettre à un avocat l’offre de l’assureur afin que celui-ci vérifie sa conformité avec les sommes allouées habituellement par les juridictions.
La transaction est définitive sauf en cas d’aggravation.
Le tiers payeur (organisme social) doit produire sa créance à la demande de l’assureur, à défaut de production dans les quatre mois, il perd son droit dans le cadre de la transaction.
A défaut de transaction, la victime devra saisir le tribunal afin d’obtenir la réparation de l’intégralité des préjudices subis.
II/ La procédure d’indemnisation en matière d’accident de la route
En cette matière, comme vu précédemment, la loi de 1985 a mis en place une procédure de règlement amiable, obligeant notamment l’assureur à informer la victime de ses droits et à lui proposer une indemnisation transactionnelle.
Paradoxalement, alors que cette loi avait pour objectif de défendre les intérêts de la victime, celle-ci peut se retrouver démunie, si elle n’est pas assistée d’un avocat.
En effet, la victime à réception de l’offre de l’assureur ne pourra déterminer si celle-ci est conforme aux sommes allouées habituellement par les tribunaux.
Il est ainsi impératif de se faire assister par un avocat, dès lors que vous êtes victime d’un accident de la circulation.
L’intervention de l’avocat permettra de s’assurer que l’offre est conforme aux intérêts de la victime.
A défaut, la procédure judiciaire sera mise en place.
Elle consistera à la mise en place d’une expertise judiciaire et l’allocation d’une provision, puis ensuite à solliciter l’indemnisation de l’intégralité des préjudices, suite au dépôt du rapport d’expertise.
En pratique, le tribunal judiciaire est compétent et il est saisi par assignation.
L’assureur de la personne responsable et l’organisme de sécurité sociale sont assignés.
Le juge civil a une compétence exclusive en cette matière, y compris lorsque le véhicule responsable appartient à une personne publique.
L’action est alors engagée contre la personne publique.
Concernant le montant de la provision, il doit être incontestable, ce qui est le cas en matière d’accident de la circulation.
La victime dispose d’une action directe contre l’assureur de la personne responsable.
Le tribunal rendra ainsi une décision qui fixera le montant de l’indemnisation, décision susceptible d’appel.
Cette procédure ne pose pas de difficultés, lorsque le responsable de l’accident est connu et assuré.
Cependant, il peut arriver que la personne responsable ne soit pas assurée ou qu’elle n’a pas pu être identifiée.
Dans cette hypothèse, il faudra saisir le fonds de garantie des assurances obligatoires.
Le Fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO)
Les conditions d’intervention sont définies par l’article L 421 – 1 du code des assurances.
Il intervient lorsque l’accident est causé par les conducteurs de véhicules non assurés ou ayant pris la fuite, mais aussi pour les accident causés par les personnes circulant sur le sol ou animaux circulant sur les voies publiques.
Le fonds a une obligation subsidiaire, il n’intervient que si un autre organisme ne peut intervenir.
Il intervient aussi pour les accidents de chasse, dommages résultant d’activités minières, catastrophes technologiques, défaillances d’entreprises d’assurances obligatoires.
Il Indemnise les préjudices corporels et matériels.
Le conducteur, auteur de l’accident ou le gardien de l’animal ne peuvent être indemnisés.
Le fonds doit être saisi dans les trois ans à compter de l’accident quand l’auteur du dommage est inconnu.
Dans tous les cas, la saisine doit intervenir dans les 5 ans de l’accident.
Si la victime n’a subi que des dommages aux biens, elle doit agir dans un délai d’un an à compter de l’accident.
Le fonds n’intervient pas quand l’accident est causé par un animal qui n’appartient à personne.
Par Maître Stéphane Dorn, Avocat en Droit des victimes